04 Mar Rainer Michael Mason – Dictionnary Notice, 2010
Rainer Michael Mason
Geneviève Laplanche – Notice
Her art—she is a printmaker— took shape in the 1990s around a dual phenomenon of stratifications and effigies looming up. Whether working on wood or Plexiglas, Geneviève Laplanche draws outlines that depict, without any of the potential stiffness of engraving, tiny men who are by turns, from the looks of their singular, seemingly coded poses, Japanese wrestlers, matadors, players, or bombing victims—yet without denoting distinctive representations. Whilst at first exactly detailed, these ‘characters’ sloughed off their individual legibility fairly quickly to assume a softer look in the (necessarily collective) fabric that Laplanche creates by shifting the moulds slightly on the print support.
Thanks to the number of times a print passes beneath the press and the positions created by either consciously chosen or tentative shifts of the engraved plates, the paper becomes covered with mass movements of people or clusters of quick images brought together in slow motion.
Through proliferation, the work in progress scrambles the isolated figures and projects them into the universal. But, the artist insists, ‘the energy of it must remain. It’s a snapshot, individuality’. This formal control can be read as a certain view of humanity and a political stand on her part. Independent, unwavering, in revolt, capable of change, the individual exists only in ‘a continuum like a murmur, which never ends, similar to life, which is what prolongs us’ (Henri Michaux, 1899-1984).
This politically committed message takes on formal volume in the play of colours that Laplanche applies to the ‘ballets’ of figures joined in action and which she sets out in tiers, manoeuvres, differentiates in the image’s depth of field through the re-inking of the plates and the chromatic variations she achieves. Vibration and dynamism.
This creation of space via tonal values is further helped by the transparency of the materials. It is probably that transparency that led Laplanche in her Strata 1-2 to test the interactions, sharp contrasts and transitions that are brought into play by the padded layering, viewed from the side, of large sheets saturated with tinted ink in the most blazing hues. Visually we couldn’t get any closer to the alternately friendly and halting harmonics and intervals of music. It is an effect of that order that is offered by the three layers of industrially produced fabrics that display supporters, shown leaping up and down, facing off or fleeing, through a return to the image, albeit reworked by computer. Screen-printed in black on a steel-mesh curtain that is cold and fluid, they suddenly mobilise viewers in a threatening scene.
Son art – elle est graveur – s’articule dès les années 1990 selon une double donnée : l’effigie surgissante et la stratification. Que ce soit sur bois ou sur plexiglas, Geneviève Laplanche exécute au trait le dessin de silhouettes traduisant sans aucune des roideurs possibles dans la gravure de petits hommes qui, de leurs poses singulières et comme chiffrées, sont tour à tour lutteurs japonais, matadors, joueurs, victimes de bombardements– sans dénoter cependant de représentations distinctives. Car ces « caractères », au départ exactement détaillés, dépouillent assez vite leur lisibilité individuelle pour s’infléchir dans le tissu (forcément collectif) que Geneviève Laplanche crée à force de décaler les matrices sur le support d’impression. À la faveur de la succession des passes et des positions que créent les déplacements dirigés ou tâtonnants des plaques gravées, le papier se couvre de bouquets d’images minute rassemblées au ralenti ou de grands mouvements de foule. Le work in progress brouille par la prolifération l’unicité des figures isolées et les projette dans l’universalité. Mais, insiste l’artiste, « il doit en rester de l’énergie. C’est un instantané, c’est l’individualité. » Cette régie plastique peut se lire comme une vision de l’humanité et une prise de position politique de sa part. Autonome, irréductible, en révolte, capable d’évolution, l’individu n’existe que dans « un continuum comme un murmure, qui ne finit pas, semblable à la vie, qui est ce qui nous continue » (Henri Michaux, 1899-1984). Ce message engagé trouve son épaisseur plastique dans le jeu des couleurs que Laplanche applique aux « ballets » de figures unies dans l’action et qu’elle étage, manœuvre et différencie dans la profondeur de champ par le réencrage des planches et par leurs variations chromatiques. Vibration et dynamisme. Cette mise en espace par le biais de valeurs tonales est encore favorisée par la transparence des matériaux. C’est elle sans doute qui a porté Geneviève Laplanche à expérimenter dans ses Strates 1-2 les interactions, les contrastes nets et les transitions que met en jeu, contemplée latéralement, la superposition matelassée de grandes feuilles gorgées d’encre teintée des plus ardents coloris. On ne saurait être visuellement plus proche des harmoniques et intervalles tour à tour accueillants et heurtés de la musique. C’est encore un effet de cet ordre qu’offrent à la faveur d’un retour à l’image, retravaillée à l’ordinateur, les trois couches de tissages industriels porteuses de partisans qui bondissent, font face, fuient. Imprimés au pochoir, en noir sur ce rideau à mailles d’acier aussi froid que mouvant, ils mobilisent tout à coup le spectateur dans une scène menaçante.
RAINER MICHAEL MASON – Artistes à Genève du XVe au XXle siècle – sous la dir. Karine Tissot – ed. APAGE et Notari, Genève 2010